LA RECRUDESCENCE DES TROUBLES MUSCULO-SQUELETTIQUES EN MARTINIQUE

par | Sep 11, 2024 | Actualités 2024

Nous recevons chaque semaine pour un conseil juridique, des salariés soumis à un licenciement pour inaptitude après la découverte de troubles musculo-squelettiques par la médecine du travail. Sur 200 travailleurs reçus en 6 mois, une vingtaine présente cette pathologie soit 10%, chiffre important qui nécessite des mesures à mettre en place rapidement en matière d’ergonomie pour éviter ces troubles.

 

Selon l’article L4121-1 du Code du travail, « l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés. Dans ce cadre, l’employeur ne doit pas seulement diminuer le risque, mais doit l’empêcher. » Il a donc une obligation de résultat à mettre en place des mesures de prévention. Ceci est possible par la prévention mais aussi par la formation et l’analyse de l’exécution des tâches dont l’ergonomie est une ressource. L’ergonomie est une discipline qui étudie les interactions entre l’Homme en activité et les composantes de cette activité (tâches, outils, méthodes, environnement de travail pour élaborer des systèmes permettant d’œuvrer dans des conditions d’efficacité. La mise en œuvre de mesures d’ergonomie permet au travailleur d’exécuter ses missions en toute sécurité tout en étant productif. L’apparition de troubles musculo-squelettiques chez le travailleur est forcément une preuve d’inefficacité des mesures actuellement mises en place quand elles le sont.

 

On retrouve ces pathologies dans tous les secteurs d’activité de l’économie, BTP, commerce, nettoyage industriel, santé, métallurgie, aide à la personne, restauration et le résultat est l’inaptitude et ses conséquences lorsque la médecine du travail accepte de reconnaître cette inaptitude. Nous observons une réticence de la médecine du travail à reconnaître le caractère professionnel de l’inaptitude qui double le montant de l’indemnité de licenciement, maigre consolation pour le travailleur aux prises à des douleurs persistantes et invalidantes qui voit sa vie professionnelle, sociale, relationnelle complètement bouleversée. C’est d’ailleurs un handicap reconnu par la MMDS parfois chez de personnes encore jeunes.

 

La faute inexcusable de l’employeur peut être évoquée.  Elle correspond à un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat révélé par un accident du travail ou une maladie professionnelle. L’employeur aurait dû avoir conscience du danger et n’a pas pris les mesures nécessaires pour le prévenir. Cette faute peut entraîner un accident de travail ou causer une maladie professionnelle. Cependant, l’employeur n’est pas le seul à blâmer. La Sécurité Sociale qui dispose d’un service prévention à un devoir, à partir des statistiques de maladies professionnelles dont elle a connaissance, de mobiliser ses compétences pour la prévention de ces pathologies.

 

Entre 1995 et 2015, nous avons connaissance qu’elle a sous-traité cette obligation de formation moyennant finance à l’Education et à la Santé. Elle a fourni des affiches à mettre dans les entreprises. Elle a organisé des stages pour les formateurs. Il est vrai que l’ergothérapie a été intégrée dans les référentiels de diplôme de l’enseignement professionnel et notamment, la prévention des TMS. Cependant, la Sécurité Sociale joue un rôle fondamental dans le contrôle des entreprises dans l’application des mesures de prévention, les gestes et postures de travail. L’action de la Sécurité Sociale est devenue invisible depuis le départ à la retraite de la plupart des agents voués à ce domaine. Pour rappel, elle a tenté de contrôler les enseignants qui faisaient cette formation en envoyant un agent dans les classes. Les inspecteurs de l’Education dont c’est le rôle d’évaluer le travail des enseignants lui ont rappelé qu’il n’avait pas à intervenir dans les classes sans leur consentement et les enseignants syndiqués lui ont demander d’aller voir ce qui se passe dans les entreprises. Pour ce qui concerne la santé, des initiatives ont été prises dans les établissements mais la volonté a disparu par suite du déficit d’agents pour les remplacements des personnes en formation.

 

En conclusion, la recrudescence des troubles musculo-squelettiques au travail est flagrante et demande un traitement spécial de la part des acteurs de la prévention, des employeurs et de la Sécurité sociale.